Femme atteinte du syndrome de Down assise devant son ordinateur

Article original : 23 avril 2021
Modification: 28 avril 2021

Le concept de l’accessibilité numérique, aussi appelée A11Y sur le web (A+11 lettres+Y pour accessibility) n’est pas nouveau. On en parle davantage depuis quelques années. On se rend compte qu’il s’agit d’une préoccupation qui touche toutes les sphères de notre société. L’idée générale de l’accessibilité veut que l’on adapte nos structures sociales à des modèles sociaux qui encouragent l’autonomie, la participation et les modifications du milieu afin de s’assurer que tous aient des opportunités égales.

Infographie de l'acronyme a 11 lettres et y pour accessibility
Infographie descriptive de l’acronyme A11Y | Andréanne Jodoin – LLD

Nous voyons tous les jours des rampes d’accès pour les fauteuils roulants, des signaux sonores aux intersections, l’utilisation de pictogrammes simplifiés pour donner des indications, des bancs de parc placés à des endroits stratégiques, etc. Cela dit, l’accessibilité ne s’applique pas et ne devrait pas, seulement s’appliquer à notre espace physique. Aujourd’hui, le monde numérique constitue pratiquement une extension intangible de notre monde physique. Il faut donc aussi s’attarder à le développer et améliorer la qualité de notre accessibilité numérique. Il est important de le faire afin de veiller au respect des droits de chaque individu, au respect des lois, mais aussi parce que vous pourriez en bénéficier éventuellement. Voici donc une explication de ce qu’est l’accessibilité numérique et trois raisons pour lesquelles elle est nécessaire.

Qu’est-ce que l’accessibilité numérique?

L’accessibilité numérique consiste à faire en sorte que les sites web, les logiciels et autres technologies numériques puissent être utilisés par des individus présentant un ou plusieurs handicaps. Ces déficiences peuvent être auditives, cognitives, neurologiques, motrices, verbales ou visuelles. C’est aussi d’adapter la technologie de façon à la rendre compatible avec les outils adaptatifs mis à la disposition de ces personnes pour pallier à leur handicap. On encourage l’utilisation d’un design dit universel, soit exploitable par la plus grande variété possible de personnes aux capacités et habiletés diverses.

Clavier d'ordinateur adaptatif en braille pour malvoyants
Malvoyant utilisant un clavier adaptatif SENSE en braille | @Sigmund • Unsplash – LLD

Dans un monde idéal, une personne aveugle ou ayant développé un trouble visuel devrait pouvoir naviguer fluidement avec un lecteur d’écran sur ses appareils numériques. Un individu ayant des difficultés motrices devrait pouvoir adapter son installation ou ses menus de façon à ne pas en souffrir ou pouvoir l’utiliser à son rythme. Une autre, ayant des troubles neurologiques, devrait pouvoir comprendre l’information qui lui est présentée sans que le médium n’ajoute des difficultés supplémentaires à sa compréhension. Une personne dyslexique devrait pouvoir lire à son rythme et dans un style d’écriture qui ne rend pas la chose encore plus ardue. Une personne sourde ou malentendante devrait pouvoir comprendre un message qui est partagé principalement de façon auditive, par exemple, en ayant la possibilité de suivre les sous-titres à un rythme raisonnable.

Bref, nous devrions apprendre à réfléchir notre technologie en fonction d’une variété de limitations physiques et de façons d’y pallier. Il serait toutefois faux de dire que l’accessibilité ne bénéficie qu’aux gens présentant des handicaps. Une personne s’adaptant à une nouvelle langue ou une maman qui ne souhaite pas réveiller ses enfants appréciera des sous-titres de qualité au même titre qu’une personne sourde par exemple.

1. Pour respecter les droits de la personne

L’accessibilité numérique est un droit. La Charte québécoise des droits et libertés de la personne constitue une loi fondamentale au Québec. Elle permet de s’assurer que tous soient considérés comme étant égaux devant la loi. On y mentionne brièvement le droit d’accès de tout individu aux services essentiels, à l’exercice du droit civique, à l’éducation, à un travail et à l’opportunité de développer sa culture. Il y est aussi considéré comme discriminatoire d’exclure une personne due à un handicap ou au moyen de pallier à cette limitation. Bien que l’on n’y mentionne pas l’accessibilité numérique, on peut tout de même débattre du fait que si un site web donnant accès à des documents gouvernementaux, des soins de santés ou une éducation ne sont pas utilisables, il s’agit d’une forme d’exclusion s’il n’existe aucun autre moyen d’y accéder. C’est certainement le cas lorsqu’une décision consciente de ne pas les rendre accessibles a été prise pour des raisons financières ou parce que ces personnes ne font pas partie de « la norme ».

En effet, l’accessibilité numérique est nécessaire aussi pour l’accès aux services essentiels, au travail et à l’éducation, mais aussi au développement de sa culture et pour l’accès au divertissement. Cela est d’autant plus valable depuis les débuts de la pandémie de COVID-19 en 2020. On a alors demandé à tous de s’isoler, de travailler à partir du web, de rencontrer nos médecins, psychologues, amis et plus encore à partir de logiciels de vidéoconférences, de jeux vidéo, ou de sites web. Il est donc important que tous puissent s’en servir de façon efficace, que ce soit pour une raison professionnelle, d’éducation, de santé ou même de divertissement et de socialisation, sachant que ces deux derniers aspects sont cruciaux pour le maintien d’une bonne santé mentale.

2. Afin de respecter les lois en vigueur

Dans ce même esprit, plusieurs pays et organisations ont commencé à prendre position sur le sujet et à imposer des lois et des standards à respecter pour améliorer l’accessibilité numérique. Le Americans with Disabilities Act (ADA) est entré en vigueur en 1990 aux États-Unis, mais ce n’est que le 1er janvier 2019 que cette loi a été renforcée en regard à l’accessibilité numérique (digital accessibility) qui impose maintenant les recommandations du W3C, WCAG 2.0, comme un standard à respecter.

Ces normes sont d’ailleurs reconnues un peu partout dans le monde. Le Canada a également pris position au sujet de l’accessibilité en 2005 avec l’Accessibilité for Ontarians with Disabilities Act (AODA) dans laquelle on mentionne l’importance d’un design universel et de l’accessibilité numérique en utilisant le standard AA du WCAG 2.0. En fait, janvier 2021 constitue la date limite pour le secteur public et les grandes entreprises pour s’y conformer et produire un rapport le démontrant. Celui-ci doit contenir entre autres, la politique de l’entreprise et un plan stratégique concernant les mesures à mettre en place pour atteindre un certain niveau d’accessibilité ainsi qu’une preuve de formation des employés, etc.

Au Québec, le Standard sur l’accessibilité des sites Web (SGQRI 008 2.0) est en vigueur depuis 2018 afin d’assurer les droits des personnes handicapées. Bien qu’il s’agisse d’une norme plutôt qu’une loi, celle-ci a été créée pour se conformer aux lois leur assurant le droit à l’intégration scolaire, professionnelle et sociale. Ce standard est également basé sur les normes du W3C WCAG 2.0.

Photographie d'une balance et d'un maillet
Photographie d’une balance | Sora Shimazaki • Pexel – LLD

De son côté l’Europe a aussi fait du standard double AA pour l’accessibilité du web en 2016. De toute évidence, il semble y avoir une prise de conscience générale du besoin grandissant d’atteindre un certain niveau d’accessibilité numérique respectable un peu partout dans le monde et il faut savoir que depuis, le W3C a aussi publié les normes WCAG 2.1.

3. Pour que vos clients et votre entreprise en bénéficient

L’accessibilité numérique peut bénéficier à votre entreprise ainsi qu’à vos clients ne présentant aucun handicap. En effet, l’accessibilité sert tous les jours à des gens de votre entourage qui apprécient les sous-titres ou aiment agrandir la fenêtre de leur navigateur pour avoir une meilleure visibilité. Il faut aussi mentionner une population vieillissante. Cela signifie que nous devrons de toute façon accommoder ces générations habituées à naviguer sur le web et cela vous inclut. Si vous aimez les jeux vidéo, l’écriture et la lecture sur le web, vous complétez vos impôts sur un logiciel, et aimeriez toujours exécuter ces activités en vieillissant, alors il faut s’assurer que tous ces produits restent ou deviennent accessibles.

Si vous rendez vos produits accessibles à un plus grand nombre de clients, cela aura de bonnes répercussions pour votre entreprise. Votre réputation en sera améliorée et l’on recommandera vos services dans les différents cercles sociaux. Vous rendrez également vos produits et services accessibles à un plus grand nombre de clients potentiels.

L’accessibilité numérique: dilemmes et réticences

Finalement, comme l’accessibilité numérique est une question d’éthique et de droits, que certaines lois la renforçant sont déjà en vigueur et que votre entreprise en bénéficiera, il semble tout à fait logique de faire des efforts en ce sens.

Les réticences les plus fréquentes face au défi que posent les changements à apporter pour améliorer l’accessibilité numérique au sein d’une entreprise concernent généralement des inquiétudes financières, des délais de productions plus longs et la crainte d’une charge de travail imprévue pour peu de résultats.

Ce n’est évidemment pas une tâche facile de tout rendre accessible. Chaque individu est unique et a des besoins différents. Il existe toutefois déjà de nombreuses technologies adaptatives pour faciliter la vie des gens et la plupart du temps il suffirait de rendre nos logiciels, nos technologies et nos sites web compatibles avec ces outils. Le langage HTML lui-même est déjà fait pour être accessible et lisible par des lecteurs d’écrans. Si un exemple de bonne pratique à suivre vous intéresse, consultez mon article sur l’accessibilité des formulaires web.

Cela prend donc parfois du temps, des formations, l’argent, mais SURTOUT une bonne planification et de la volonté. En fait, si les options d’accessibilités et un design accessible sont prévus avant le développement d’un produit, il est généralement assez simple de le rendre accessible par défaut plutôt que de tenter de réparer ce qui a déjà été créé. De plus, votre clientèle sera satisfaite que votre entreprise fasse un effort en ce sens et soit ouverte aux commentaires et critiques constructives afin de s’améliorer. Tout le monde en sera gagnant!

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